Le Dossier du mois - Bring back the skins*
* "Ramenez les skins" : titre phare du chanteur de skinhead-reggae Judge Dread

[ CHAPITRE I  : SKINHEAD MOONSTOMP* ]
[ CHAPITRE II  : CHAOS ]
[ CHAPITRE III : STAY RUDE ]
[ CHAPITRE IV : LES POINGS LEVES MAIS LES POINGS LIES ]
[ CHAPITRE V : POUR MA CLASSE ]
[ LIENS, DOCUMENTATION ]

Chapitre V : POUR MA CLASSE*
*Morceau du groupe Brigada Florès Magon

Fin des années 90 : toute la Gaule est occupée par la musique insipide des boys-band. Toute ? Non ! Quelque part dans des salles de concert obscures, d'irréductibles jeunes aux cheveux courts ou hérissés résistent encore et toujours à l’envahissement de la variété pour décérébrés. Petit à petit l’œuvre salutaire des SHARP et autres ARASH (Anti Raciste Action - SkinHead) a fait son chemin et la distinction entre skinheads et boneheads est désormais établie dans la scène alternative. Des groupes comme Molodoï (avec l’ancien chanteur des Bérurier Noir) ont permis aux jeunes issus du rock alternatif de se faire une autre opinion sur la réalité du mouvement skinhead par rapport à celle qui était jusqu'ici mise en avant par justement les Bérus et la mouvance redskin qui les suivait. Car ces redskins avaient choisi leur nom en opposition aux skins qui étaient tous considérés comme fafs (faf pour "France Aux Français", donc fasciste, et antifa pour antifasciste). Les reds de l'époque n'avaient donc rien à voir avec le trip skinhead. Quoi qu’il en soit, avec la fin du rock alternatif –période riche en couleurs- nombre d’anciens reds se retrouvent orphelins et certains s’investissent dans cette scène nouvelle pour eux, brûlant ce qu’ils avaient adoré et adorant ce qu’ils avaient brûlé. Le ska et surtout la Oi! débarrassés des derniers oripeaux nationalistes, un vent nouveau va souffler sur le territoire skinhead. Un son y sera associé : le streetpunk (on dira pour simplifier qu'il est à mi-chemin entre le punk-rock et la Oi!).

De très bons groupes antifascistes sortent de l’ombre comme les  8°6 Crew qui alternent à l’époque les morceaux ska/skinhead-reggae avec ceux Oi!/streetpunk, les Voices of Belleville qui font une Oi! musclée et sans fioriture, ou encore Los Fastidios et leur streetpunk italien. Les concerts succèdent aux concerts et les disques sortent à la pelle, confirmant le succès d’une scène bien vivante. Enfin un groupe streetpunk parisien commence à faire parler  de lui : Brigada Florès Magon. Son influence grandissante sur les jeunes rasés aboutit à la naissance d’une organisation de skins d’extrême gauche : le RASH (Red & Anarchist SkinHeads)/Paris-banlieue (la première section RASH était née quelques années auparavant à New York City). C’est la 2ème vague de redskins français qui fait écho à celle de 85-90. Mais entre temps nos kids se sont imprégnés de la véritable culture skinhead, même si certains sont toujours à la traîne. Les Rasheurs s’imposent petit à petit et font  le ménage dans le mouvement. D’autres sections naissent en France et renforcent la tendance. Aujourd’hui on retrouve nombre de skins dans les manifs de la Confédération Nationale du Travail ou dans les cortèges antifascistes (comme le 1er mai 2002, entre les deux tours de l’élection présidentielle, où le casque Trojan du SHARP côtoyait à l’occasion les trois flèches vers le bas du RASH). La presse radicale et libertaire trouve un écho chez nos têtes rasées et nombreux sont ceux à enchaîner concerts et manifs antifa. On en retrouve aussi certains dans les stades de foot, formant ainsi la frange des hooligans antifascistes, l’histoire des hools étant souvent liée à celle des skins et n’étant pas non plus la propriété des fachos. Une toute dernière initiative vient de voir le jour, celle plus anecdotique de l’I.S.S (Internationale Skinhead Situationniste) dont le manifeste consultable sur le Red Forum vaut son pesant de cacahuètes ("Situ & skin c’est bien, si tu l’es pas tant pis !"). En 2004, Opció K 95 (Oi! catalane), Los Foiros (Oi! bordelaise), Stage Bottles (streetpunk allemand) ou encore Brixton Cats (rock'n'roll parisien) sont des groupes représentatifs de la scène redskin et de très bons fanzines comme Barricata, Une vie pour rien ? ou encore Chéribibi nous tiennent informés de l'actualité skin & punk.

Au niveau de Reims, quatre groupes puisent plus ou moins leurs racines dans certains chapitres de cette histoire : les Western Special dont les productions ska/rocksteady/reggae ont même du succès à l’étranger ; les Usual Suspects qui font du streetpunk et dont le chanteur Arno édite le fanzine No Government ; enfin leurs cousins les Bad Riot, aussi dans le streetpunk, avec le chanteur Val qui produit le fanzine La faute à qui ? avec d’autres comparses rémois dont moi-même. Les petits derniers sont The (hard) Dudes (avec des membres communs aux deux autres groupes) qui donnent dans le streetpunk'n'roll. Mes amis les Usual (qui viennent de splitter malheureusement) et les Bad Riot n’hésitent pas à jouer en soutien aux couleurs rouges et noires. Si nous ne sommes pas des enfants de chœurs, nous avons pour la plupart une conscience de classe et c’est déjà pas mal. Quand au look, est-il vraiment nécessaire d’avoir le crâne rasé et toute la panoplie skinhead pour apprécier toutes ces bonnes musiques que sont le ska, le reggae, la Oi! ou le streetpunk ? Depuis 1969 cependant un leitmotiv demeure et ne nous quittera jamais : ne pas se laisser marcher sur la gueule ! Reds, skins, punx, bootboys,antifa hooligans : la force est avec nous !

Stéphan (avec l’aide de Valéry et de Fabienne)

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